
Titre : L’Enigmaire
Auteur : Pierre Cendors
Maison d’édition : Quidam Editeur
Genre : Science-Fiction
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Je suis allée en librairie car j’avais un problème : je participais à un club de lecture dont le thème était : choisir un livre pour son titre. Donc, sans lire la quatrième de couverture. Pour cela, je vais voir mon libraire et comme il connaît maintenant bien mes goûts, il m’a donné trois livres, je les ai payés et basta. Ces trois livres, c’était Une vie de Saint de Christophe Siégert, mais je ne pouvais pas le choisir parce qu’on lit la première phrase et celleux qui l’ont lu savent. Le deuxième est celui que j’avais choisi pour ce club et je l’ai lu sur le chemin du retour dans le métro : La migration annuelle des nuages de Premee Mohamed. Le troisième que j’ai adoré mais que je n’ai pas choisi car j’avais peur de ne pas pouvoir l’expliquer : l’Enigmaine de Pierre Cendors et publié aux éditions Quidam.
Et de quoi cela parle ? L’action se situe à Orze, ville bombardée en 1916 et depuis transformée en zone rouge interdite au public. Sauf que des fouilles archéologiques montrent qu’il y a une activité magnétique anormale ainsi que les vestiges d’un ancien culte chtonien. Ceux qui s’y rendent en reviennent changés. D’ailleurs, nous suivrons trois personnes qui y sont allées : Lazlo Ascendio. Adna Szor et Sylvia Pan. Pourquoi s’y rendent- ils ?
Pour comprendre ce livre, il est indispensable de connaitre l’auteur et ses influences.
Pierre Cendors est né en France en 1968. Il est écrivain, illustrateur et artiste peintre. Après son service militaire, il part habiter au Conemara, puis il rejoint une communauté spirituelle en Écosse où il rencontre sa femme. Il publie son premier roman en 2006 qui s’appelle l’Homme caché. En 2010, il publie Engeland, en 2015 Archives du vent ; en 2018, la vie posthume d’Edward Markham ; en 2019, Silens Moon et enfin en 2021, l’Enigmaire dont il dit lui-même que c’est un hommage à Andrei Tarkovski
Mais qui est-ce ? Andrei Tarkovski est un cinéaste soviétique né en 1932 et décédé en 1986. Il est considéré comme l’un des plus grands réalisateurs soviétiques et il a réalisé sept longs métrages qui le placent en tant que maître du septième art : L’enfance d’Ivan en 1962, Andreï Rublev en 1966, Solaris en 1972., Le miroir en 1975, Stalker en 1979, Nostalghia en 1983 et le Sacrifice en 1985. Personnellement, je n’en ai pas encore vu, mais je les ai ajoutés à ma liste de films à regarder en urgence.
Ce qu’il faut retenir, c’est que les livres de Pierre Cendors sont comme des puzzles. Il prend les codes de la Science Fiction pour transformer ses livres en quêtes oniriques. Il aime désorienter ses lecteurs.
Et ici, où retrouve la patte de l’auteur au travers des thèmes développés
Notre intrigue prend place à Orze, une ville bombardée en 1916, et cette ville est en elle-même un personnage de ce roman. C’est un lieu très bizarre qui ne prend pas en compte le temps. Il les superpose. Ainsi, nos personnages peuvent se voir s’ils ont déjà été présents ou voir les autres personnages présents sur ces lieux. Mais peu importe le moment où ils étaient présents. Vous voyez ? Orze devient une bulle en elle-même et nos personnages le sentent dès qu’ils y pénètrent. Ce qu’on veut nous dire par là, c’est que certains lieux gardent en mémoire ce qui s’est passé sur leur sol. Comme un traumatisme mémoriel et c’est quelque chose que l’on ressent un peu lorsqu’on visite un lieu chargé en histoire.
De plus, quand Pierre Cendors fait de la Science Fiction, il l’associe avec une sorte de sacré. Dans l’Enigmaire, on voit, via les fouilles, qu’il y a des traces d’un culte chtonien, par exemple. Et plus on avance dans le temps, plus le résultat de ces fouilles semble bizarre. La modernité n’arrive pas à percer ce mystère. Qui plus est, le gouvernement a interdit l’accès à ce lieu où non seulement ce lieu attire les gens, mais il les transforme.
Et tout cet environnement va nous servir de cadre pour des quêtes personnelles. Nos trois personnages : Lazlo, Adna et Sylvia sont là pour combler un vide intime. Lazlo est le premier spationaute, autrement dit le premier enfant né dans l’espace. Il se sent déconnecté des autres car il n’est pas né sur Terre et il développe une attirance pour l’archéologie car il cherche ses racines, en fait. Adna, elle, est veuve et elle cherche l’inspiration – pour composer de la musique. Elle est perdue et cherche un nouvel élan, quelque chose à laquelle se raccrocher. Enfin, Sylvia. C’est une page blanche, elle passe mais on connaît des histoires par Adna. Sylvia, elle cherche qui elle est. Elle cherche son essence.
Ensuite, je vous disais que l’Enigmaire est un hommage au cinéma de Tarkovski. Alors, certes, j’avoue mon ignorance sur l’œuvre de cet homme, mais de ce que j’ai pu glaner dans mes recherches, cela est dû à une certaine lenteur assez fascinante dans la manière de filmer. Tarkovski aimait beaucoup faire des focus sur l’eau, la nature ou le temps qui file et en lisant cela, je me dis que l’hommage y est évident ! C’est exactement ce que j’ai ressenti à la lecture de ce récit. Alors oui, ce livre m’a donné envie de voir ces films. Et même que j’ajouterai un encart si jamais.
Enfin, l’Enigmaire est une énigme. C’est un roman où on n’a pas toutes les clés. On tâtonne, on cherche, on revient en arrière. J’ai même envie de vous dire : ce livre doit être encore meilleur à la relecture. On l’apprécie et on pose ses moments préférés la première fois, puis on se pose des questions. On laisse mûrir et on y revient. Laissez de la chance à votre esprit qui fera de nouveaux liens et vous verrez cette histoire sous un nouvel œil.
Tout ceci est renforcé par un style un peu.. particulier.
L’Enigmaire n’est pas le genre de livre qu’on prend sur un coup de tête, sauf votre chroniqueuse, bien entendu. Quand j’ai fait mon petit panel après lecture des avis des personnes, j’ai vu qu’il y avait deux écoles. Où les gens ont aimé ou ils ont été déroutés par leur lecture, par le style. Et c’est aussi pour moi la patte de Pierre Cendors.
C’est différent. Cela peut vous marquer parce qu’on n’a pas vraiment l’habitude d’avoir des écritures différentes dont le style est atypique. C’est un voyage, en somme, dans un univers un peu onirique. Vous voyez un peu ce sentiment quand on arrive à Silent Hill ? Eh bien c’est un peu cela. On n’a pas les codes, mais on apprend.
Et l’Enigmaire dans tout ça ?
Pour moi, c’est un très bon livre, on il est un univers à lui tout seul. Pour paraphraser un peu mon libraire, je ne suis pas sûr d’avoir tout compris mais j’ai adoré. Et c’est tout à fait cela. Ce livre m’a appris à lâcher prise, à prendre des pauses dans la lecture. Et me demander : Mais qu’est-ce que je suis en train de lire ?
Peut-être que vous aimerez cette sensation. Peut-être pas, d’ailleurs. Peut-être que, comme moi, vous le mettrez dans la pile à relire. Ce sera demain, dans un mois, dans un an. Peut-être me reverrais-je dans ce livre ? Allez savoir ?
Que lire après l’Enigmaire ?
- Dans cet esprit d’attente dans des paysages particuliers, dans une période marquée par l’Histoire, je vous recommanderai Un Balcon en forêt de Julien Bracq
- Pour se chercher et découvrir qui on est : Marcher de Thomas Espedal.
- Pour retrouver dans l’univers de l’auteur : Silens Moon, de Pierre Cendors, tout simplement.
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